Critique : A la merveille – Amour

Affiche du film A la merveille de Terrence Malick sur laquelle le prêtre interprété par Javier Bardem tend la main vers le visage baissé d'une paroissienne.

Le titre du dernier Terrence Malick est à la fois très évocateur et assez mal choisi car s’il est la traduction maladroite du nom original de l’œuvre, To the Wonder, il représente également bien le long métrage qui touche comme The Tree of Life au sublime.

On aurait pu penser que son nouveau film allait être bâclé et inabouti, Malick ayant cette fois-ci sorti son nouveau projet peu de temps après son œuvre primée à Cannes au lieu de prendre plusieurs années comme il le fait généralement. Et pourtant, A la merveille est un nouvel exercice de style parfaitement maîtrisé qui, s’il n’atteint pas de sommets, aborde comme le précédent métrage du cinéaste des questionnements universels qui nous touchent et nous bouleversent tous.

On peut considérer le film comme une suite logique à The Tree of Life. Ici encore, nous retrouvons des personnages confrontés à la voie de la Grâce et la voie de la Terre. Ce sont des protagonistes hésitants, perdus entre la pureté de l’amour et les tentations auxquelles chaque humain est confronté. Malick nous parle de l’amour que l’on porte aux autres, à la nature, à Dieu et à la foi qu’Il inspire chez de nombreux individus. Mais il évoque également l’acceptation de l’amour que peuvent nous donner les autres, le comportement brutal qu’elle peut engendrer et notre tendance autodestructrice face à elle. Ainsi, l’homme et la femme incarnés par Ben Affleck (Argo) et Olga Kurylenko (Quantum of Solace) sont dépassés par la pureté et la beauté de l’amour qu’ils se transmettent l’un à l’autre.

Photo de Ben Affleck et Rachel McAdams dans le film A la merveille de Terrence Malick. Les deux acteurs s'étreignent dans un champ.

A l’inverse, nous retrouvons deux autres personnes, un prêtre et une femme interprétés par Javier Bardem (Skyfall) et Rachel McAdams (Passion) qui cherchent un amour salutaire qui pourrait les sauver et leur redonner espoir. L’un le cherche dans la religion et parcourt les endroits difficiles pour être témoin d’un acte de Dieu tandis que l’autre tente de retrouver ce sentiment chez un homme, le personnage de Ben Affleck.

Avec un scénario très simple et que l’on pourrait résumer vulgairement par le fait qu’un homme hésite entre une belle parisienne et une belle fermière du Kentucky, Malick parvient à nous dévoiler un récit lourd mais profond duquel nous n’avons jamais décroché. Il y a évidemment un propos religieux qui peut s’avérer agaçant mais Malick s’en sert intelligemment et nous prouve que l’homme est dans l’hésitation depuis la nuit des temps, incapable de se contenter de l’amour véritable, sauf pendant de courts instants représentés dans le film par le rapprochement des corps qui s’attirent et se tournent autour avant de se séparer, pour mieux se rapprocher à nouveau.

S’il est semblable à The Tree of Life sur le fond, il l’est également sur la forme. Si vous aviez détesté l’œuvre mettant en scène Brad Pitt pour ses passages métaphysiques sur fond de musique classique, rassurez-vous, vous ne verrez ici aucune création de l’univers, aucun dinosaure et aucun volcan en éruption. En revanche, le style est toujours aussi lent, contemplatif. Malick filme ses personnages en plans serrés et balaye avec sa caméra des paysages vides et magnifiques. Les interrogations des protagonistes sont exprimées à travers les voix off et le film comporte très peu de dialogues, ce qui peut s’avérer déstabilisant et ennuyant. La photographie est splendide et dès les premières minutes passées dans les rues de Paris et au Mont Saint Michel, on sait que l’on va vivre une expérience visuelle inoubliable, poétique et magique.

Photo de Javier Bardem dans le film A la merveille de Terrence Malick. Le prêtre est à l'entrée d'une église et sourit à une personne.

Ben Affleck et Olga Kurylenko sont remarquables dans les rôles principaux. Lui fait preuve d’une sobriété impressionnante. Il représente l’homme qui tait son amour, se montre distant par esprit de force et de protection tandis qu’elle incarne la vivacité et la grâce. Elle exprime ses émotions avec sincérité et l’on ressent parfaitement son malaise viscéral et son incompréhension face à ce sentiment incontrôlable, imprévisible et puissant.

A la merveille est le nouveau cadeau de Terrence Malick. Le cinéaste, poète et philosophe nous surprend nouvelle fois et nous émerveille grâce à ces images que lui seul est capable de mettre en scène. Que l’on aime ou non, on est forcé de reconnaître le talent de l’homme qui fait partie de ces réalisateurs qui provoquent des questionnements qui nous suivent longtemps après notre sortie de la salle.

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