Critique : Blancanieves – El Artista

Affiche du film Blanca Nieves de Pablo Berger sur laquelle le haut du visage de Blancanieves est visible. Ses yeux regardent l'objectif. Une pomme rouge croquée est visible près du titre.

C’est Pedro Almodóvar qui nous a convaincus d’aller voir Blancanieves. Il a dit : « Es la mejor pelí del año ! » Alors on a écouté ses conseils et on s’est rendu au cinéma illico presto pour savourer ce petit film espagnol qui reprend le célèbre conte des frères Grimm. L’année dernière, nous avions déjà eu droit à deux adaptations américaines très inégales. La première, de Tahar Rahim (Immortels), était à nos yeux ratée, indigeste et visuellement moche. La seconde nous a beaucoup plus emballés. Il s’agissait du blockbuster Blanche Neige et le chasseur qui, malgré son titre de mauvais porno, s’est affirmé comme un grand spectacle sympathique, sombre et regorgeant d’effets spéciaux somptueux. Mais ces deux longs métrages sont bien en dessous de l’œuvre hispanique que nous venons de découvrir.

Au niveau de l’histoire, Pablo Berger est fidèle au récit original mais il ajoute cependant deux éléments qui font tout le charme du film. Il ancre son long métrage dans l’Espagne des années 20 et nous offre une œuvre en noir et blanc, muette, qui ne manque pas de créativité et d’idées. Le deuxième apport est d’avoir intégré le milieu de la corrida, ce qui donne lieu à des séquences sublimes.

Ne soyez pas sceptiques vis à vis de Blancanieves. On sait qu’un film sans dialogues, tourné en 1.33 peut donner l’impression qu’il est ennuyeux et dépassé. Mais au contraire, Pablo Berger réussit à garder un rythme constant et même si l’on connaît le conte depuis notre enfance, nous avons toujours envie de voir comment il s’est approprié les nombreuses péripéties au fil de cette heure quarante que l’on ne voit pas passer. Il développe des thèmes touchants et à plusieurs moments nous nous sommes dits qu’il atteignait la perfection. Sa narration est fluide et certains plans symboliques nous laissent de marbre, comme les jeux d’ombres que Berger utilise à merveille.

Photo de Macarena Garcia dans le film Blancanieves de Pablo Berger. Sur une photo en noir et blanc, l'héroïne est en tenue de torero face à l'objectif et pointe son épée

La relation entre la jeune héroïne et son paternel est bouleversante. Cette histoire de retrouvailles tragique regorge de bons sentiments mais ne tombe jamais dans la facilité. Le parti pris de la réalisation est déjà risqué mais en plus, Berger réussit à faire émerger des émotions que l’on n’a pas ressenties depuis un petit moment dans une salle de cinéma. Il est entouré de comédiens qui n’en font jamais trop et qui restent toujours subtils malgré la difficulté de l’exercice. Daniel Gimenez-Cacho (Kill the gringo) interprète le père de Blanche Neige, un ancien héros au regard triste qui s’illuminera lorsqu’il croisera celui de sa fille. Dans cette version espagnole, vous retrouverez également une marâtre perverse, odieuse, bien plus effrayante que Charlize Theron pourtant excellente. Chapeau à Maribel Verdú (La zona, Tetro) qui livre une prestation marquante et nous aurait probablement terrorisés si nous l’avions vue enfants.

Mais notre coup de cœur, c’est bien sûr Macarena Garcia, radieuse et gracieuse. Forte, féminine et innocente, elle s’affirme comme la meilleure Blanche Neige que l’on ait vu ces derniers temps, balayant aisément Kristen Stewart et Lily Collins. Pour son premier rôle, elle réussit à s’imposer avec brio et nous espérons qu’elle retrouvera des rôles dans des œuvres de ce calibre.

Blancanieves est une surprise inespérée, une relecture magnifique parfois drôle et souvent poignante de l’un des contes les plus adaptés au septième art. Magnifié par la partition d’Alfonso de Villalonga, le film de Berger nous ramène à l’âge d’or du cinéma et prouve que le silence peut être le meilleur des discours.

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