Dans un lycée pour filles de Corée du Sud, la disparition soudaine de Kyung-min plonge l’établissement dans la détresse la plus totale. Alors que l’enquête est en cours, le personnel du lycée cherche à fuir toute responsabilité. Si la thèse du suicide est rapidement évoquée, la famille de l’élève, plusieurs de ses camarades et certains membres des autorités suspectent Young-hee, la dernière personne à avoir vu Kyung-min.
Dès la première séquence, le réalisateur Kim Ui-seok évoque le problème du harcèlement scolaire en plaçant Kyung-min comme une potentielle victime de Young-hee. Pourtant, la scène suivante révèle la proximité entre les deux adolescentes, révélant ainsi l’ambiguïté de leurs rapports dont la véritable nature sera révélée tout au long du film. En préservant le mystère autour de leur relation, le cinéaste, qui signe ici son premier long-métrage, contient la puissance émotionnelle du drame qui s’apprête à se jouer.
Il laisse également planer les soupçons autour de Young-hee, qui devient très rapidement le bouc-émissaire de son entourage, et notamment de la mère de Kyung-min. Un long entretien durant lequel l’absence d’empathie envers l’élève totalement encerclée révèle le besoin de trouver un coupable à cette disparition. Pourtant, aucune preuve tangible n’a été découverte, Kyung-min demeure introuvable et seules ses affaires ont été retrouvées au-dessus du fleuve.
Progressivement, le supposé bourreau devient la victime, à la fois de ses camarades mais également de la mère de l’adolescente disparue qui font preuve d’une cruauté extrême à son égard. En parallèle, le personnel de l’établissement scolaire fait tout pour que l’image du lycée ne soit pas ternie par la disparition mais également pour s’en détacher émotionnellement.
Le discours d’un professeur demandant à ses élèves de s’endurcir témoigne par exemple de cette distance mais également du fatalisme omniprésent qui se dégage d’After My Death. Que ce soit l’administration scolaire ou les autorités, tous semblent fermer les yeux sur les raisons du suicide, de plus en plus plausible, de Kyung-min, et estiment pour la plupart que Young-hee l’y aurait poussée. Principale cause de mortalité chez les jeunes de 15 à 24 ans en Corée du Sud, le suicide reste donc tabou dans la société que dépeint Kim Ui-seok, qui préfère l’éluder et ne pas voir le malheur de ses adolescents.
La tristesse ambiante et l’ambiance oppressante du film donnent l’impression que tout est d’ores et déjà perdu pour Young-hee, personnage profondément touchant interprétée par l’excellente Jeon Yeo-bin. Les soupçons du spectateur envers elle disparaissent très rapidement au profit d’une empathie totale, alors qu’elle ne cesse d’être accablée au point d’être finalement détruite.
Le discours final terrassant de l’adolescente accentue le sentiment de solitude auquel elle ne peut plus échapper, au même titre que les plans évocateurs dans un long tunnel dans lequel elle apparaît au côté de Young-hee. Histoire d’un amour sacrifié parsemé de moments de grâce parfois bouleversants, After My Death s’impose comme un drame très réussi, où le suicide devient le seul moyen d’expression pour se faire voir dans une société aveuglée par ses œillères.