Critique : Cold in July – Assaut

Affiche de Cold in July. Les trois acteurs principaux sont devant une voiture rouge américaine et avancent vers l'objectif dans un paysage de nuit.

Quatrième long métrage de Jim Mickle (Stake Land, We are what we are), Cold in July marque la première incursion du cinéaste dans le registre policier. Thriller froid, singulier et sans concession, ce petit bijou noir est notre coup de cœur de fin d’année, à travers lequel Jim Mickle expose un récit bourré d’influences qui prend toujours le spectateur à contre-pied.

Tout commence lorsque Jim Dane, un père de famille tranquille vivant dans une petite ville du Texas, abat malencontreusement un cambrioleur. En état de légitime défense, Dane est rapidement relaxé et les policiers n’ont aucun mal à clore l’affaire. Alors que Jim tente de se remettre de cette épreuve difficile et de reprendre une vie normale, il se retrouve traqué par le père de la victime, un ancien détenu qui compte bien le faire payer.

Avec Cold in July, Jim Mickle nous rappelle fortement le maître incontesté du fantastique, John Carpenter. Lorsque le titre apparaît, on reconnaît la même police que celle des œuvres de Big John, ainsi qu’une partition électronique très réussie à rapprocher des thèmes de New York 1997 et The Thing. Là où Mickle dépasse le simple hommage et prouve qu’il a un point commun avec le génie, c’est dans sa capacité à installer une tension dès les premières minutes et à ne jamais la faire descendre jusqu’à la fin.

Comme dans Halloween, la menace plane immédiatement et paraît insurmontable. Mickle s’affranchit des codes du film policier. Au lieu de nous proposer sa version de A History of Violence, il nous dévoile une histoire décousue et donc imprévisible. La force du long métrage est de nous présenter un individu parfaitement banal, empli de doutes et de peurs, et non un dur à cuire au passé mystérieux, élément utilisé jusqu’à l’épuisement ces dernières années. Le processus d’identification est total et accentue davantage la pression. Jim Dane ne sait absolument pas comment réagir face aux événements auxquels il est confronté. Ne faisant pas spécialement preuve de sang froid, il suit son instinct et fait des erreurs qui l’amèneront vers une sale histoire et un déchainement de violence. Dans les dernières minutes, l’imagerie guerrière et la chute de Dane comportent quelques similitudes avec celles de Taxi Driver, même si le ton de l’œuvre et le parcours de Travis Bickle sont radicalement différents.

Photo de Sam Shepard, Michael C. Hall et Don Johnson dans le film Cold in July. Les trois acteurs sont dans un pick-up et contemplent quelque chose sur leur droite.

S’il n’est pas du tout dans le registre favori de Carpenter, Mickle possède pourtant cette même faculté de s’affranchir des standards actuels et de dévoiler une œuvre à contre-courant, qui n’essaye pas de se la jouer Tarantino du pauvre, n’insiste pas sur l’humour noir et surtout n’enferme jamais ses personnages dans des cases préétablies. Ainsi, Dane n’est pas le seul à connaître une constante évolution. Il en va de même pour le personnage de Sam Shepard (brillant, comme d’habitude), un paternel brisé, silencieux et redoutable. A chaque retournement de situation, on croit pouvoir anticiper ses réactions mais Mickle va à l’encontre de nos attentes et son œuvre se révèle bien plus complexe et humaine que le simple polar que l’on pensait voir. Lorsqu’il filme l’arrivée de l’étincelante voiture de Don Johnson à la manière de Carpenter dans Christine, on pense avoir tout saisi du protagoniste interprété par l’ancien flic de Miami. Encore une fois, on se trompe. Si l’on avait tendance à réduire Johnson au rang de cowboy pervers et has been comme avait voulu nous le faire croire Robert Rodriguez dans Machete, on se rend finalement compte que le comédien est bien plus profond et attachant.

En adaptant le roman de Joe R. Lansdale, Mickle signe le meilleur suspense de l’année, qui nous emmène sur le terrain d’organisations criminelles aux pratiques répugnantes. Polar léché à la photographie impeccable, Cold in July est une descente en enfer qui propose quelque chose d’inhabituel et d’inconfortable au spectateur. Le long métrage est également la preuve que Michael C. Hall (Dexter) est aussi à l’aise au cinéma qu’à la télévision et qu’il est tout à fait capable de donner une véritable épaisseur à ses personnages sur un format plus court. Jusqu’au bout, l’année 2014 n’aura cessé d’être surprenante.

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