Critique : Diplomatie – L’art de la guerre

Affiche du film Diplomatie sur laquelle Dussollier et Arestrup sont face à face dans une cambre d'hôtel et semblent négocier. Nous voyons la Tour Eiffel dans le reflet de la fenêtre.

Les huis clos au cinéma donnent souvent lieu à de grands moments s’ils sont portés par des comédiens à la hauteur et si le metteur en scène ne se contente pas de faire du théâtre filmé. C’était le cas de Carnage de Roman Polanski qui était sauvé par quatre acteurs formidables. Dans les maîtres du genre, on retient Sidney Lumet qui avait signé 12 hommes en colère et l’oublié The Offence dont la majeure partie est un interrogatoire oppressant et insoutenable.

Cette année, ce sont deux monstres du cinéma français qui s’affrontent pour un duel dont l’issue a changé le cours de l’histoire. Dans la nuit du 24 au 25 août 1944, le Général Von Choltitz avait pour ordre de dynamiter la capitale française et d’emporter avec lui 3 millions de personnes. Pour quelles raisons ? Un ordre personnel du Führer. Quelques heures avant l’explosion, le consul de Suède Raoul Nordling réussit à s’introduire dans la chambre du Général grâce à des passages secrets de l’Hôtel Meurice. Entre les deux hommes débute une confrontation complexe durant laquelle Nordling va devoir faire preuve de ruse et de patience pour convaincre son adversaire.

En adaptant la pièce de Cyril Geli, Volker Schlöndorff a réussi à dresser un suspense à partir d’un événement dont on connaît tous l’issue. Comme Bryan Singer l’avait fait dans Walkyrie dans un tout autre registre, il parvient à nous captiver et nous faire oublier l’évidente conclusion. Diplomatie est une œuvre passionnante pour les questionnements moraux qu’elle soulève. Même s’ils ont déjà été vus maintes et maintes fois, ils s’avèrent toujours aussi intéressants car ils sont amenés avec subtilité par deux comédiens familiers de ce genre d’exercices. Arestrup et Dussollier s’opposaient déjà dans les représentations de la pièce.

Photo d'André Dussollier et Niels Arestrup dans le film Diplomatie. Dans une chambre, Dussollier observe Arestrup en costume de soldat allemand en train d'allumer sa cigarette.

Niels Arestrup joue de l’ambiguïté qu’il maîtrise à merveille et qui représentait déjà certains de ses personnages notamment dans les récents A perdre la raison, Tu seras mon fils et Un prophète. Sa voix très calme et la fragilité de son corps s’opposent à ses airs inflexibles et son regard froid. Dans la deuxième moitié du film, il reprend le contrôle de cette partie d’échecs et vient tout chambouler lors d’une déclaration qui relance le long métrage. Quant à André Dussollier, il cache sa véritable personne derrière sa bonhommie habituelle et sa diction parfaite mais réserve lui aussi quelques surprises.

Le film aborde des thèmes comme l’obéissance aveugle et le sacrifice mais ne donne pas de leçon morale. Nous sommes témoins d’un duel traité avec objectivité, indispensable à la réussite de l’œuvre. Le spectateur comprend les logiques de chacun, du moins jusque dans les dernières scènes plus engagées et dénonciatrices.

Diplomatie n’est pas destiné aux élèves de troisième mais une véritable partie de plaisir très bien équilibrée portée par deux comédiens qui déploient une énergie impressionnante et nous immergent totalement dans l’action. Pour les parisiens blasés et les amoureux de la capitale, la reconstitution et les dernières images de Schlondorff ne vous laisseront pas indifférents.

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