Avec un concept aussi original et risqué, il était normal que le long métrage de Spike Jonze fasse autant parler de lui. On se souvient d’avoir été émerveillés l’été dernier lorsque nous avons découvert la bande annonce. Love story futuriste, Her semblait aborder un sujet complexe avec une simplicité désarmante et les premières images nous prenaient à la gorge, à tel point que l’on espérait même découvrir un visage derrière cette voix qui faisait chavirer le cœur de Joaquin Phoenix.
Cette attente était d’ailleurs complètement stupide et heureusement que l’œuvre n’a pas suivi ce chemin. Spike Jonze a vu grand et pose avec son long métrage des questions profondes sur le rapport d’un individu à l’amour, sur l’acceptation de ses sentiments et sur le besoin de se reconnaître en autrui pour voir son amour grandir.
Durant toute la première partie du long métrage, le cinéaste réussit à nous faire croire que Samantha, l’intelligence artificielle, est la personne idéale pour Theodore. Individu sensible et réservé, le personnage principal a du mal à surmonter une rupture. Avec ce programme, il voit pour lui une échappatoire à la solitude. Jonze nous dévoile une société futuriste loin de l’idée que l’on s’en fait habituellement. Il n’y a ni la noirceur de Blade Runner ni les évolutions spectaculaires de Minority Report. Elles ne sont du moins pas apparentes.
Ici, les fringues rétro de Joaquin Phoenix, affublé d’une moustache qui adoucit son visage, le soleil de Los Angeles et les grands bâtiments vitrés confèrent au long métrage une atmosphère paisible. Tout le monde est rivé à son téléphone et parle tout seul mais où est le problème si l’on est tous heureux de cette manière ? A l’image de Theodore, on est séduit par Samantha. Même si l’on est conscient du problème que soulève Her, on a envie que leur relation fonctionne. Les passages où Theodore passe du temps à se balader et discuter avec le programme sont irrésistibles et Spike Jonze réussit un mélange des genres brillamment dosé.
On a l’impression que Her balance plus du côté du drame sentimental que du film de science-fiction alors qu’il est probablement la meilleure surprise du genre que l’on ait eue depuis Moon de Duncan Jones. Ce dernier traitait lui aussi en partie des rapports que l’on peut entretenir avec une intelligence artificielle.
Dans la deuxième partie, toutes les illusions que Spike Jonze nous avait mis en tête sont remises en question. Le message final, difficile à évoquer sans spoiler, paraît gros mais comment ne pas succomber à ce dernier plan plein d’espoir. Comme dans Max et les maximonstres, c’est le retour aux sources qui est salvateur.
Her ne serait rien sans son acteur principal, Joaquin Phoenix, qui interprète ici un solitaire naïf qui n’hésite pas à laisser déborder ses émotions. La pureté de ses sentiments et l’aspect « irréel » de Samantha malgré son humanisation se contredisent à merveille et perdent encore plus le spectateur. On finit par croire, notamment au vu de ses rapports avec les autres personnages féminins, que Samantha pourrait bien être la femme de sa vie.
Si vous étiez sceptiques par rapport au concept de Her, n’hésitez plus. Cet ovni est un bijou d’intelligence, une œuvre d’anticipation qui bouscule. Malgré son côté mélancolique et son sujet casse-gueule, Her reste accessible à tous les publics et n’est jamais déprimant. Nous avons là un film unique qui fera date et mérite amplement son Oscar du meilleur scénario original.
A noter également l’excellente bande son composée par Arcade Fire