Odyssée spatiale bénéficiant du statut de film culte avant sa sortie et annoncée comme le nouveau chef d’œuvre de Christopher Nolan, Interstellar est le blockbuster qui déchaîne les foules, dont vous entendrez forcément parler lors d’un repas à la cantine de votre entreprise ou d’une soirée entre amis où s’opposeront les défenseurs de la rationalité et les inconditionnels rêveurs.
Si l’on comprend les détracteurs de Nolan, qui critiquent son manque d’ambition visuelle et sa volonté d’inscrire des récits incroyables dans un cadre réaliste, jamais le cinéaste ne nous a déçus, même lors de la conclusion du Dark Knight qui reçut un accueil mitigé. Interstellar ne déroge pas à la règle et représente l’une des expériences cinématographiques les plus touchantes de l’année.
Inutile de s’attarder sur le scénario que Nolan s’est appliqué à garder secret jusqu’à la sortie. Comparé, souvent à tort, à 2001 l’odyssée de l’espace et au récent Gravity, Interstellar deviendra probablement une référence de la science-fiction mais ce n’est finalement pas cet aspect que l’on retiendra avant tout. D’un point de vue visuel, le long métrage est une réussite incontestable et l’on retrouve là des images aussi impressionnantes que dans l’œuvre d’Alfonso Cuarón ou Sunshine de Danny Boyle. Devant certaines séquences, on se remémore également certains classiques découverts en enfance, à l’image du Trou Noir, production Disney kitsch mais marquante. Il y a aussi cette formidable gestion du silence, alternée avec la partition la plus réussie de Hans Zimmer depuis un bon moment. Il y a encore ces spectaculaires rebondissements, cette recherche de planètes exploitables par l’être humain et cette aventure digne des productions Amblin qui ont elles aussi joué un rôle essentiel dans notre passion pour un art qui continue à nous surprendre malgré le manque d’inspiration apparent.
Ce qui nous a désarmés dans Interstellar, c’est sa manière d’aborder le temps à travers une histoire familiale apparemment simple mais dont la complexité ressort dans les deux dernières parties. Durant la première heure, Christopher Nolan expose la vie d’un fermier, ancien pilote, et de ses enfants passionnés comme lui par ce qui se passe au dessus de nos têtes. Si l’on trouve quelques longueurs à cette lente exposition, on comprend à la fin que ces séquences étaient capitales, non seulement pour l’évolution du script mais également pour mettre en avant l’importance des liens de parenté et le partage qu’ils doivent engendrer. Interstellar est un film qui force le spectateur à redevenir crédule et à rehausser certaines notions bafouées, notamment au cinéma. Il est inutile de chercher une quelconque cohérence à la fin, ce que certains spécialistes n’ont apparemment pas voulu entendre, et l’on apprécie la simplicité que réussit à trouver Nolan pour nous dire que l’amour triomphe de tout sans tomber dans l’exagération et le pathos.
Qui mieux que Matthew McConaughey pouvait incarner cet homme aux motivations ordinaires avec une telle sincérité ? Une nouvelle fois, l’acteur est habité et totalement crédible, même dans les moments qui auraient pu être gênants. C’est aussi en grande partie grâce à lui que l’on est captivé par son parcours. Si les seconds rôles sont impeccables (Anne Hathaway, Ellen Burstyn, Wes Bentley), l’autre performance que l’on retiendra est celle de Jessica Chastain. Comme dans The Tree of Life, elle représente un symbole d’espoir.
Christopher Nolan et son frère Jonathan ont réussi à écrire une histoire pleine de bons sentiments dévoilés durant le spectaculaire voyage d’un homme confronté à un dilemme impossible. Le cinéaste nous immerge dans une époque où la Terre va mal et où les pénuries sont de plus en plus fréquentes. Si l’on pensait au vu de l’exposition de cet environnement que Nolan allait une nouvelle fois opter pour la rationalité, le réalisateur privilégie pour la première fois l’imaginaire dans une dernière partie qui enchantera les naïfs et finira de dégoûter les plus cyniques. Interstellar est une vraie proposition de cinéma, pas toujours juste mais riche et singulière qu’il serait dommage de rater en salles.
Superbe critique pour un super film!