Après Kick Ass et X-Men : Le commencement, Matthew Vaughn continue les adaptations de comics et s’attaque cette fois-ci à une œuvre de Dave Gibbons et Mark Millar. Annoncé comme un chef d’œuvre pop et trash oscillant entre Tarantino et James Bond, on peut dire que Kingsman a légèrement été survendu. Si le plaisir est indéniable, le long métrage affiche rapidement ses limites et a souvent du mal à les contourner.
Certes, le film est ultra dynamique et Matthew Vaughn signe des passages d’action ahurissants, qu’il réussit à rendre lisibles malgré leur impressionnante cadence. Il est clair que la séquence de l’église représente le mieux cette faculté du réalisateur. Certaines idées comme les hommages à James Bond et le fait de choisir une teigne pour le rôle principal sont savoureuses. Le procédé n’est pas très original et reprend les codes des très mauvais Identité secrète et Alex Rider : Stormbreaker pour mieux s’en moquer. Matthew Vaughn nous ressort la carte de l’humour subversif et politiquement incorrect de Kick Ass.
Vaughn met en avant l’élégance et le flegme anglais et nargue la culture gastronomique des Etats Unis avec panache. Ces idées bien trouvées sont au service d’un scénario faiblard. Nous retrouvons le jeune en manque de repères recruté par un mentor hyper charismatique, ainsi que le méchant prêt à anéantir le monde digne des James Bond période Roger Moore. Heureusement, tous ces personnages caricaturaux sont interprétés par des acteurs en grande forme. Si le cheveu sur la langue de Samuel L. Jackson est irritant, la performance débridée et remplie d’autodérision du comédien font qu’on se laisse une nouvelle fois prendre au jeu. Colin Firth trouve un rôle inhabituel qui lui va comme un gant. L’acteur n’est pas familier des films d’action mais il réussit une performance physique impressionnante et devient attachant lorsqu’il forme et conseille le jeune Taron Egerton. On craignait que ce dernier soit insupportable mais sa malice et son décalage par rapport aux autres recrues nous ont convaincus. Il ne faut évidemment pas oublier la valeur sûre Mark Strong et surtout Michael Caine, figure badass du film d’espionnage (Icpress, Contre une poignée de diamants) venue faire ici quelques clins d’œil décontractés. L’interprétation est impeccable et le cinéaste sait comment mettre en avant ses protagonistes pour renforcer l’ironie du long métrage.
Hélas, il est difficile de ne pas trouver l’entreprise prétentieuse. Vaughn est un réalisateur efficace mais il n’a jamais été un surdoué de l’image, même si c’est ce qu’il laisse penser. Ainsi, ses parti pris visuels parfois grossiers sont réutilisés de manière excessive. C’est notamment le cas pour l’explosion des figures importantes de ce monde. Si l’on apprécie l’humour potache et bas du front, on retrouve néanmoins les lourdeurs de Kick Ass et l’habitude d’en faire trop du cinéaste. C’est également ce qui caractérisait Stardust, conte de fée qui hésitait entre mièvrerie et second degré. Kingsman est plus équilibré mais l’on en ressort tout de même avec l’impression que Vaughn ne sait pas vraiment où aller, voulant à la fois signer un divertissement populaire et une œuvre jubilatoire à la violence exacerbée.
Malgré ses défauts, Kingsman reste tout de même l’un des blockbusters les plus prenants de ce début d’année. Vaughn réussit à combler le manque d’originalité du script avec ses trouvailles farfelues qui étonneront le public non habitué aux séries Z. S’il frôle parfois le nanar de luxe, Kingsman s’en sort néanmoins avec les honneurs grâce à sa brochette d’acteurs et certaines scènes d’action totalement décomplexées.