John Trent est enquêteur pour des compagnies d’assurances. Lorsqu’il est chargé de retrouver Sutter Cane, un auteur de best-seller horrifiques, Trent voit des événements anormaux se produire autour de lui. A mesure que son enquête avance et qu’il se rapproche de Cane, l’enquêteur plonge dans la folie. Confronté à des visions qui le dépassent complètement, Trent perd rapidement les pédales.
En 1994, John Carpenter réalise L’Antre de la folie alors qu’il a déjà à son actif bon nombre de chefs d’œuvre. Le sujet du film tombe à point nommé pour le cinéaste puisque le long métrage est une véritable mise en abyme de son métier.
Sutter Cane est un écrivain qui provoque des émulations malsaines, dont la puissance des écrits est comparée à des textes religieux. Sur l’œuvre de l’auteur qu’il est censé retrouver, Trent porte d’abord un regard méprisant et cynique. John Carpenter confronte d’emblée la fascination morbide que le travail artistique de Cane suscite au regard dédaigneux du héros, qui va peu à peu se laisser happer dans l’univers de l’auteur. Souvent considéré comme le Maître de l’horreur, Big John s’amuse ici de l’image qu’il renvoie alors que l’industrie hollywoodienne lui a tourné le dos quelques années plus tôt.
La force du réalisateur est de réussir cet exercice sans prétention et sans vouloir livrer une quelconque affirmation. Lorsqu’il lance une pique, Carpenter le fait toujours avec humour dans L’Antre de la folie. Cela se ressent notamment à travers les répliques du personnage de Charlton Heston, éditeur excité de commercialiser des romans qui le répugnent.
L’autre point qui permet au cinéaste de se déchaîner est la folie, sujet central du film. Entre visions cauchemardesques et situations tournant rapidement au malaise, Carpenter nous perd dans un labyrinthe fascinant dans lequel on s’abandonne totalement. Tout comme le héros, le spectateur ne sait jamais s’il navigue dans la réalité ou le rêve, et son cynisme vis-à-vis de Trent laisse progressivement place au doute. Dans la conclusion, Carpenter inverse les rôles et place le spectateur à la place du héros. Grâce à ce procédé, le réalisateur nous offre une fin terrifiante, en grande partie pour la question qu’elle soulève.
L’univers isolé de Cane et sa sacralisation sont deux autres éléments particulièrement oppressants du film. Les courts plans sur les monstres suffisent à nous répugner et l’effet de répétition nous enferme dans l’enfer que vit le héros. Pourtant, le dynamisme du montage et l’absurdité omniprésente font que le spectateur en redemande.
Le réalisateur comprend les peurs de son public et en joue avec brio. Toujours aussi doué pour la suggestion, le cinéaste nous rappelle que la peur des monstres ne disparaît jamais vraiment et qu’elle est parfois nécessaire. Grâce au scénario de Michael de Luca, Carpenter peut également clamer son amour à Lovecraft, l’une de ses influences majeures.
Avec L’Antre de la folie, Big John nous offre l’un de ses films les plus drôles et une performance habitée du grand Sam Neill. Le long métrage nous rappelle que le cinéma d’horreur, dans ses meilleurs jours, est doté d’une puissance évocatrice capable de suivre le spectateur très longtemps.