Lorsque Hud fait son retour à Blackstone, les habitants tremblent et rêvent de le voir mourir. Accusé d’un vol dont l’argent n’a jamais été retrouvé, le mystérieux cow-boy compte bien mettre la main dessus. Il souhaite également venger la mort de son frère, qui avait été lynché puis tué pour le même crime.
Tourné en 1969, Le Spécialiste vient tout juste de ressortir dans une superbe édition 4K, restaurée à partir du négatif original. Si ce western-spaghetti n’est ni un sommet du genre, ni l’un des chefs d’œuvre de Sergio Corbucci, il demeure à ce jour un long-métrage solide qui réserve de jolies surprises.
La scène d’introduction présente un cavalier solitaire qui n’est pas sans rappeler le Django de Corbucci ainsi que les cavaliers solitaires interprétés par Clint Eastwood dans la trilogie du dollar. Johnny Hallyday n’a d’ailleurs aucun mal à apporter tout son charisme à Hud. S’il dévoile un regard rieur au début du film, le rockeur apporte par la suite des nuances à son jeu, à mesure que son personnage évolue jusqu’au final étonnamment sauvage.
Dans la première partie, Hud donne l’impression qu’il maîtrise parfaitement la situation. Face à un shérif particulièrement gauche mais attachant et des habitants visiblement effrayés et dociles, le héros se lance dans une quête apparemment bien trop simple par rapport à ses talents de tireur. C’était sans compter sur les nombreuses trahisons et manipulations orchestrées par des personnages secondaires qui ne cessent de gagner en épaisseur jusqu’au final.
La jeune rockstar de l’époque n’a aucun mal à s’effacer pour laisser la place aux seconds rôles. Parmi eux, on retrouve une femme fatale interprétée par Françoise Fabian mais également une bande de jeunes vagabonds sans attaches qui joueront un rôle capital dans la conclusion brutale. Face à l’inefficacité d’un shérif pourtant déterminé, les complots s’accumulent et chacun espère avoir sa part de l’introuvable butin.
Alors que le suspense est habilement installé par Corbucci dans la première partie, les doutes du spectateur s’envolent lorsque certaines motivations sont révélées à la moitié du film. Par la suite, les péripéties s’avèrent particulièrement prévisibles et l’ennui pointe le bout de son nez. Puis, lors du dernier acte concentré dans la rue principale de Blackstone où l’heure des règlements de comptes a sonné, le rythme et la violence s’intensifient. La réalisation jusqu’ici sobre de Corbucci multiplie alors les excès, qui retranscrivent à merveille la violence de la confrontation entre des bourgeois terrés qui refont surface à la vue du butin et des hors-la-loi qui ne reculent devant rien pour se le procurer.
Le retour de Hud débouche donc sur le chaos et la folie, que Sergio Corbucci retranscrit avec des idées de mise en scène typiques du genre. Les travelings arrière dévoilant des grands espaces écrasants laissent place aux gros plans sur des visages exagérément expressifs et à l’enchaînement de champs-contre-champs dans un montage ultra dynamique.
Le Spécialiste bénéficie des superbes étendues et des montagnes de la Vénétie, sublimées par la photographie de Dario Di Palma. Au cœur des magnifiques montagnes italiennes et de la petite ville corrompue de Blackstone, la maîtrise de Sergio Corbucci est palpable, au même titre que le talent de comédien d’un chanteur qui ne reviendra malheureusement plus au western par la suite.
Le Spécialiste est disponible en combo Blu-Ray/DVD et Blu-Ray 4K depuis le 5 juin 2018.