Lors d’un cambriolage foiré, deux frères sont pris au piège. Le plus jeune, Dave, parvient à s’en sortir alors que son aîné Kenneth est condamné à une peine de prison. Quatre ans plus tard, Kenneth est libéré et Dave l’accueille. Prêt à démarrer une nouvelle vie, l’ex-détenu ne se doute pas que la femme qu’il aime vit désormais avec son petit frère. Il va alors peu à peu basculer dans la violence.
Polar noir, Les Ardennes est une œuvre désespérée où le malheureux destin des protagonistes semble scellé dès les premiers instants. Evoluant dans un paysage où la violence et la drogue font partie du quotidien, les frères font chacun à leur manière face à leur terne réalité. Dans leurs antagonismes, Dave et Kenneth rappellent quelque peu le duo interprété par Harvey Keitel et Robert De Niro dans Mean Streets.
Le premier tente de mener une vie honnête et de préserver son couple en le gardant secret. Le second est instinctif, impulsif et jaloux. Son incapacité à communiquer engendre de nombreux conflits qui se règlent généralement aux poings.
Contrairement au premier succès de Scorsese, Les Ardennes ne revendique en rien l’attachement à un quartier et la nostalgie d’une jeunesse où l’on grandit soudés. Les protagonistes vivent dans un paysage lugubre duquel on ne retient que le béton, la sensation d’étouffement et l’éparpillement d’une vie qui leur échappe constamment. Des couleurs bleues et grises se détachent uniquement la devanture rouge d’un bar, les phares d’une voiture ou les néons d’un parking souterrain.
Dans l’esthétique, Les Ardennes se rapproche plutôt de Bullhead ou Fargo, avec lequel il partage également l’humour noir. Dans le deuxième acte, les frères retournent dans les Ardennes, l’un de leurs plus beaux souvenirs d’enfance, afin de réparer une bourde. Alors que ce périple devait les sauver, il ne fera que les confronter à une galerie de personnages et une série d’événements à la fois plausibles, absurdes et surtout très brutaux.
Alors que l’on pensait assister à un polar social explorant la dualité entre deux frères, déjà brillamment traitée par James Gray (La nuit nous appartient) et d’autres cinéastes, le long métrage prend une toute autre tournure. Le réalisateur Robin Pront et le scénariste Jeroen Perceval, également interprète de Dave, laissent place à la surprise et à une horreur qui ne cesse de croître. Le fossé entre Kenneth et Dave se creuse. Les dialogues traduisent le malaise d’un homme totalement perdu et la folie de son frère.
Le dénouement sauvage est logique mais le metteur en scène détourne notre attention avec des sous intrigues outrancières et l’on ne voit rien venir. En jouant dans la seconde moitié sur les ellipses, en prononçant les différences entre les deux frères et en les confrontant à des fous sans morale, Robin Pront transforme Les Ardennes en série B totalement maîtrisée proche des œuvres de Nicolas Winding Refn et Walter Hill.