En quelques années, Greta Gerwig s’est imposée comme l’une des nouvelles figures du cinéma indépendant américain. En collaborant avec Noah Baumbach, Woody Allen, Al Pacino ou Mia Hansen Løve, la comédienne et scénariste a dévoilé un univers où ses nombreuses références n’ont jamais étouffé son énergie créatrice.
Avec Maggie a un plan, Gerwig revient à un exercice plus sobre que Mistress America et s’impose dans une comédie mineure mais agréable. En travaillant le personnage de Maggie avec Rebecca Miller (The ballad of Jack & Rose), l’actrice et la cinéaste ont fait de l’héroïne le point central d’un triangle amoureux drôle et attachant. Aux côtés de Gerwig, Julianne Moore continue de se réinventer et Ethan Hawke excelle dans un registre évoquant son travail avec Richard Linklater et Julie Delpy.
Ils incarnent un couple d’académiciens qui voit son quotidien morose chamboulé par l’arrivée de Maggie, trentenaire qui tente d’avoir un enfant. Son regard plein de candeur, sa spontanéité et sa bienveillance vont séduire l’écrivain marié qui trouvera en Maggie un appui solide dans l’écriture de son roman. Mais cette dernière sera rapidement dépassée par l’égocentrisme de John, qui n’est peut-être tout simplement pas fait pour la littérature.
Greta Gerwig apporte toute la vitalité nécessaire à un script qui dépend de la fantaisie de son héroïne. Ses questions existentielles ne lui enlèvent jamais sa légèreté et sa force. Sa personnalité rappelle ainsi certains protagonistes de Woody Allen, au même titre que son talent pour mettre en place un plan foireux qui lui retombe dessus. Rebecca Miller plante sa caméra dans Washington Square et laisse Maggie tourner en rond, tomber amoureuse puis trouver une solution pour s’échapper de sa vie de famille oppressante dans le parc réconfortant.
Les traits de caractère des personnages sont caricaturaux mais jamais agaçants. Le spectateur accepte totalement le dynamisme de Maggie mais surtout les coups bas, l’arrogance et l’égoïsme de John et son ex-femme Georgette, intellectuels en perpétuelle compétition. A travers leurs interventions dans des conférences en tant qu’anthropologues, le couple expose ses démons et récolte des critiques dithyrambiques. Rebecca Miller se moque gentiment, ne force jamais sur les stéréotypes et offre même à Georgette et John un sympathique interlude canadien qui relance le rythme comique du film.
Cette capacité à traiter les personnages avec tendresse et à installer un équilibre entre eux dans le déroulement de l’œuvre fait tout le charme de Maggie a un plan. Julianne Moore et Ethan Hawke s’expriment librement dans une comédie après de nombreux rôles dramatiques tandis que Greta Gerwig continue de s’imposer comme un élément indispensable du paysage humoristique new-yorkais.
L’unique problème du film est son manque d’originalité. Le plan de Maggie se dévoile avec quelques accrocs mais celui du long métrage ne surprend jamais le spectateur. On se console néanmoins avec les apparitions furtives mais marquantes de Maya Rudolph et Bill Hader, seconds rôles qui amènent de sympathiques pauses dans le parcours prévisible du trio.
Rebecca Miller ne renouvelle en rien le genre mais fait mouche en mettant constamment en avant sa distribution parfaite. La réalisatrice permet à Greta Gerwig de reprendre une recette qui fonctionne et qu’elle saura sans doute renouveler par la suite.