Après Minuit à Paris, Woody Allen revient en France et s’installe dans le sud pour nous dévoiler la romance entre un prestidigitateur cynique et une jeune médium aux pouvoirs incroyables. Avec Magic in the Moonlight, le cinéaste délaisse la gravité de Blue Jasmine et retrouve un ton plus léger sans pour autant tomber dans la niaiserie et l’exagération de To Rome with love.
Rien de neuf dans Magic in the Moonlight. Le jazz, les années 30, la magie, la France. Tous ces thèmes abordés récemment par l’auteur sont revus ici, parfois avec plus de subtilité, parfois avec moins d’entrain. Woody Allen fait du Woody Allen, comme d’habitude, entend-on à la sortie de la salle. Mais qui mieux que lui est capable de le faire ? Son nouveau film n’a rien de surprenant, loin de là. Mais il est difficile de ne pas se laisser emporter dans cette époque qui nous rappelle les romans de Fitzgerald et les comédies d’Ernst Lubitsch (Rendez-vous).
Si le mystère est finalement de courte durée, ce sont les dialogues entre Emma Stone (Easy Girl) et Colin Firth (Le discours d’un roi) qui nous tiennent en haleine. Leur histoire d’amour a beau être prévisible, elle n’en demeure pas moins délicieuse. Allen décharge comme à l’accoutumée toutes ses angoisses dans le personnage principal et cela donne lieu à des conversations fines et drôles sur la peur de la mort, la misanthropie ou l’aspect dérisoire et insensé de la vie.
Le stress permanent et l’irascibilité de Colin Firth contrastent parfaitement avec la malice et l’allégresse d’Emma Stone. Les deux comédiens forment un duo idéal et attachant. On regrettera cependant l’inexploitation de personnages secondaires tels que celui de Marcia Gay Harden (Mystic River) et Catherine McCormack (28 semaines plus tard), que l’on était ravis de retrouver chez Allen et sont finalement peu présentes voire totalement absentes du long métrage.
Au lieu de jongler entre les personnages comme il a si bien su le faire tout au long de sa carrière (Manhattan, Hannah et ses sœurs), Allen se concentre sur le couple, leurs mensonges et trahisons. Le long métrage nous rappelle donc certains de ses récents travaux à l’image de Match Point ou Scoop. En revanche, contrairement à ces deux films, on sent Allen plus en retenue et moins sarcastique. C’est ce qui rend Magic in the Moonlight à la fois lent et plaisant.
S’il n’arrive pas toujours à se réinventer, la singularité de Woody Allen fait qu’on attend chaque année son nouveau cru avec enthousiasme. On a envie que cette tradition se perpétue et c’est sans doute pour cela qu’on est plus indulgent envers l’auteur. Magic in the Moonlight n’est pas « le meilleur Woody Allen depuis longtemps » ou « l’une de ses œuvres récentes les plus agréables », comme on peut le lire chaque année dans diverses critiques. Mais on ne peut pas nier qu’il s’en dégage un véritable charme. Cela est en grande partie dû à l’irrésistible duo, aux standards de jazz chers à Woody, à son traitement narratif moins dynamique et à la sublime photographie de Darius Khondji (Minuit à Paris, The Immigrant, Amour), qui font de Magic in the Moonlight une œuvre lumineuse, prenante et élégante.