Lorsqu’il sort de prison, Tonny fait tout pour se racheter une conduite auprès du Duc, un caïd qui est également son père. De plans louches en combines, Tonny va retomber dans une spirale infernale dans les rues de Copenhague. Complètement pris au piège, le criminel n’aura plus qu’une option pour tenter de s’en sortir.
Réalisée huit ans après le premier opus, Pusher II fait partie de ces rares suites qui égalent voire surpassent leur prédécesseur. Plus émouvante et maîtrisée de bout en bout, Du sang sur les mains relance à merveille une trilogie désormais culte. A l’époque, Nicolas Winding Refn s’est penché sur l’écriture des deux derniers épisodes afin de combler le gouffre financier laissé par Inside Job, ce qui lui a permis de s’imposer comme l’un des grands cinéastes de sa génération.
Dans le face-à-face particulièrement marquant qui ouvre le film, le spectateur voit de nouveau en Tonny le chien fou qui se mettait à dos Frank dans le premier volet. Désormais, le criminel n’est plus un personnage secondaire mais le héros, et la trajectoire que lui réserve Nicolas Winding Refn est constituée de puissants enjeux dramatiques.
En sortant de prison, Tonny paraît pathétique, qu’il soit face à sa famille, ses amis, la mère de son enfant ou des prostituées. Dans toutes ses confrontations, le personnage semble à la ramasse. La caméra portée du réalisateur accentue les malaises, tout comme les silences du grand Mads Mikkelsen qui s’écrase à plusieurs reprises alors qu’il est ouvertement méprisé.
Tonny prépare ses coups de façon spontanée et l’on retrouve là l’individu du premier film qui agit comme un gangster alors qu’il n’est pas fait pour le crime. Au moment de réussir un gros coup, le personnage garde son sang froid mais est là encore mis de côté par ses associés et sa famille.
Le « Respect » tatoué à l’arrière de son crâne, Tonny ne parvient jamais à le gagner de la part de ses pairs. Les nouvelles responsabilités auxquelles il doit faire face et la visite qu’il rend à sa mère permettent au spectateur de comprendre ses réactions et de s’attacher à lui.
Si l’ambiance paraît toute aussi violente et désabusée que dans Pusher, Nicolas Winding Refn apporte une certaine luminosité à Du sang sur les mains, notamment à travers la présence d’un bébé qui vient chambouler la vie du héros. Dans Pusher, la fuite finissait d’enfermer Frank dans l’ultime séquence alors qu’elle est ici l’unique option salvatrice pour Tonny tout au long de l’œuvre.
Les humiliations qu’il ne cesse de subir, Tonny va les balayer par impulsivité en suivant le code énoncé dans le discours de l’ouverture. Ces raccords que Nicolas Winding Refn fait d’une séquence à l’autre mais également d’un film à l’autre permettent à son microcosme de la criminalité organisée de gagner en épaisseur.
Dans l’univers Pusher, Nicolas Winding Refn a réussi à créer de véritables liens entre des personnages qui évoluent dans le même milieu sans forcément se croiser. La cohérence entre les épisodes est parfaitement respectée dans chacun des opus remplis de détails méticuleux.
La prouesse du réalisateur dans sa trilogie reste le fait de se focaliser sur un seul protagoniste par long métrage. Cette intimité que l’on a d’abord avec Frank, puis Tonny et enfin Milo permet d’en faire des personnages cultes mais jamais iconiques, tant les épreuves qu’ils affrontent avec difficulté sont rarement réglées avec classe et distinction.
Dans la trilogie Pusher, les toxicomanes, les petites frappes et les caïds sont en réalité bien loin de l’image qu’ils véhiculent dans les scènes où le spectateur les découvre. Du sang sur les mains en est le parfait exemple avec Tonny, un traître qui aboie avant de se faire profondément rabaisser mais qui claquera néanmoins la porte de ce milieu de façon bouleversante.