Critique : Sans un bruit – Terreur aveugle

Affiche de Sans un Bruit de John Krasinski sur laquelle Emily Blunt se tient la bouche pour s'empêcher de faire du bruit. Elle est terrorisée et une larme coule sur son visage.

En 2020, Evelyn et Lee Abbott vivent réfugiés dans une demeure à la campagne avec leurs deux enfants. Chaque jour, la famille doit faire le moins de bruit de possible afin d’éviter les attaques de créatures aveugles mais dotées d’une ouïe particulièrement puissante.

John Krasinski réussit à placer les enjeux dramatiques de Sans un bruit très rapidement à travers une introduction mémorable. Cette première séquence nous fait immédiatement comprendre le mal qui effraie tant les personnages, même s’il est quasiment invisible, mais également les relations et les traumatismes qui régissent la famille.

La puissance de ces derniers constitue le cœur du film, qui pose malicieusement la question de la communication au sein d’une cellule familiale alors que la survie est l’unique objectif et qu’il est impossible de parler. En reprenant des thématiques chères à Steven Spielberg et M. Night Shyamalan dans Sans un bruit, John Krasinski devrait logiquement souffrir de la comparaison avec certaines œuvres des deux maîtres du fantastique.

Photo tirée de Sans un Bruit de John Krasinski sur laquelle le personnage qu'il interprète retient son fils incarné par Noah Jupe de crier, dans la forêt.

Néanmoins, le comédien et cinéaste réussit à créer de l’émotion malgré le manque d’originalité de l’ensemble, notamment parce qu’il sait parfaitement utiliser la tension pour favoriser l’attachement aux protagonistes. En choisissant de limiter la majeure partie de son récit sur quelques jours, le réalisateur évite les temps morts et donne un rythme infernal à son film.

Les premiers jump-scare efficaces mais prévisibles laissaient penser que le long-métrage manquerait d’audace et n’exploiterait pas à fond son postulat de départ. Pourtant, plus le film avance, plus les idées de mise en scène sont nombreuses. Le fait de présenter une héroïne sur le point d’accoucher offre par exemple un climax où la terreur se déploie aisément. John Krasinski ne joue pas seulement de l’état de ce personnage brillamment interprété par Emily Blunt. Il utilise également en permanence les décors et joue sur le fait que la famille n’est pas toujours réunie. Alors que le spectateur s’est attaché à chacun de ses membres, il craint qu’elle ne pourra désormais plus être rassemblée, ce qui renforce l’envie de les voir survivre.

Photo tirée du film Sans un bruit sur laquelle Emily Blunt fait signe à sa fille interprétée par Millicent Simmonds de garder le silence.

Krasinski nous rappelle par ailleurs qu’il est impossible de vivre dans le silence. Le travail sur le son est l’un des aspects les plus impressionnants de Sans un bruit. Le bruit de chaque geste du quotidien est totalement perceptible et laisse présager l’arrivée d’une créature. Par ailleurs, le fait que le personnage de Millicent Simmonds soit sourd, à l’image de la jeune comédienne, crée une peur supplémentaire dans la mesure où elle est incapable d’entendre le son provoqué par ses mouvements.

En revanche, le design des créatures, proche de celui des monstres de Stranger Things, peine à susciter l’effroi. Si l’idée de rendre concrète la menace invisible dans la bande-annonce dès les premières minutes est efficace, la peur retombe dès que les monstres apparaissent frontalement à l’écran à cause de leur apparence finalement familière.

Malgré ses défauts, Sans un bruit se regarde avec une attention et un plaisir qui ne faiblissent jamais. Le long-métrage va toujours à l’essentiel et si le dénouement paraît expéditif, le réalisateur le clôt sur un plan profondément badass et iconique qui devrait rester dans les mémoires. Si certains reprocheront à Sans un bruit de manquer de fond, cette solide série B nous prouve qu’il est encore possible de produire des films d’exploitation qui n’ont d’autre ambition que de tenir leur spectateur en haleine grâce à une mise en scène ingénieuse et une indéniable générosité.

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