Après After Earth, M. Night Shyamalan continue de se servir du film de genre pour mettre en avant des récits familiaux. Avec The Visit, ce n’est pas une réconciliation entre un père et son fils que nous découvrons mais une rencontre entre grands-parents et petits-enfants. Pour la mettre en scène, Shyamalan utilise le found footage, technique fatigante que le cinéaste s’approprie bien mieux que la plupart de ses confrères de Blumhouse et autres distributeurs de séries Z économes.
Dans The Visit, les caméras sont confiées à des personnages particulièrement intelligents qui, en plus, s’intéressent à la mise en scène. Les deux adolescents en visite chez leurs aïeux veulent tourner un documentaire afin de réconcilier leur mère avec ses parents, avec lesquels elle ne partage plus rien depuis des années. Plus que dans n’importe quel autre found footage sorti récemment, The Visit parvient à poser des enjeux dramatiques touchants qui accentuent même les passages horrifiques du film.
Grâce aux traits d’esprit de Becca et Tyler, à leur intérêt pour la technique et surtout à leur capacité à comprendre que Papi et Mamie déconnent, le spectateur s’attache à eux. Les enfants veulent soigner leur mère et ils voient en ce voyage la solution à son mal-être mais aussi à sa difficulté à construire une nouvelle vie depuis son divorce.
Shyamalan s’offre des traits d’humour qui font mouche et accentuent le malaise, à l’image de la fameuse séquence des couches ou de la partie de cache-cache sous les fondations de la demeure. Le cinéaste s’écarte des personnages stéréotypés qui caractérisaient Blair Witch, Cloverfield ou Paranormal Activity. Cette histoire portée par des enfants se vit d’abord comme une aventure et une découverte avant de sombrer petit à petit dans la peur. Il en va de même pour les protagonistes effrayants. A aucun moment on ne pense au démon ou aux tiroirs qui s’ouvrent en pleine nuit. Les grands-parents ne paraissent pas fous mais perdus, semblent avoir du mal à faire le tri dans leurs souvenirs et à garder leur posture devant leurs petits-enfants.
Shyamalan ne s’est en rien fourvoyé pour un genre qui s’essouffle et parvient même à nous réconcilier avec une technique qui manque souvent de lisibilité et n’offre que des plans répétitifs. Evidemment, certaines scènes de nuit de The Visit fonctionnent mais réservent peu de surprises tant certains effets sont prévisibles et redondants. Mais ce n’est finalement pas ce qui fait l’intérêt de l’œuvre. Si les grands-parents agissent de manière très étrange, le spectateur peine au premier abord à percer le mystère et à découvrir l’origine du mal. The Visit n’est pas une histoire de maison hantée et aucun protagoniste n’a recours à l’exorcisme pour régler le problème. La simplicité de ce thriller permet au réalisateur de développer les axes qui lui tiennent à cœur. Jusqu’au bout, grâce aux espoirs des enfants, le public a l’envie de voir la famille se réunir pour des jours meilleurs.
A travers les réactions des enfants, on revoit parfois l’irrésistible Paul Giamatti de La jeune fille de l’eau. Comme dans Sixième sens, Incassable et Signes, les enfants font preuve de maturité et nous guident vers un final où l’accent n’est pas mis sur le twist, mais sur ce dernier plan où l’on entrevoit grâce à un miroir la libération des protagonistes. S’il n’est sans doute pas le film majeur de son auteur, The Visit porte néanmoins ses thèmes de prédilection et va bien plus loin que l’exercice de style ou de commande que l’on redoutait.