
Avant de fondre pour Timothée Chalamet dans Les Filles du Docteur March, l’excellente Florence Pugh devait déjà lutter contre des tourments amoureux dans The Young Lady, mais avec nettement moins de douceur que dans la récente adaptation de Greta Gerwig. Dans ce premier long-métrage de William Oldroyd, tiré du roman La Lady Macbeth du district de Mtsensk de Nikolaï Leskov, la comédienne prête ses traits à Katherine, une jeune femme qui vient d’être mariée contre son gré à un homme aussi brutal qu’égoïste.
Refusant d’accepter une vie qu’elle n’a absolument pas choisie et synonyme d’étouffement, Katherine s’éprend d’un palefrenier prénommé Sebastian. Leur amour ne reste pas longtemps secret, et les entraîne dans une spirale destructrice. Tourné dans un cadre restreint, uniquement constitué de la maison de Katherine et des espaces qui l’entourent, The Young Lady adopte une unité de lieu réduite. Un choix qui permet de compenser le maigre budget alloué au long-métrage, mais surtout d’enfermer le spectateur à double tour dans le quotidien monotone d’une héroïne soumise et privée de liberté.

Si l’atmosphère est froide et lugubre, en partie grâce aux éclairages sombres et aux visages fermés des acteurs, elle ne laisse en aucun cas présager la chute de Katherine. À l’inverse, la vigueur de l’héroïne et l’impertinence avec laquelle elle répond à ses oppresseurs donne l’espoir qu’une autre vie est envisageable pour elle. Mais l’on est ici très loin de la douceur et la délicatesse des sœurs Brontë, et du romantisme revendiqué d’Orgueil et préjugés.
Après avoir débuté comme un récit d’émancipation, The Young Lady bascule progressivement vers le drame meurtrier façon La Balade sauvage. À chaque nouveau geste de folie de Katherine, le spectateur se dit qu’une rédemption est encore possible tant son refus de la passivité et de la domination est compréhensible, voire admirable dans la première partie du film. Mais cette spirale de violence ne pouvait avoir qu’une conclusion radicale, et le réalisateur William Oldroyd ne prive heureusement pas son long-métrage d’une telle fin.

En résulte une œuvre glaçante, qui soulève de nombreux questionnements moraux autour des choix de son personnage principal, sans y apporter de réponse, ce qui aurait d’ailleurs nui à la puissance des dernières scènes, surprenantes et cruelles. Avant Midsommar d’Ari Aster, Florence Pugh se retrouvait donc déjà au cœur d’une relation toxique, à laquelle son personnage répondait de manière tout aussi brutale après avoir atteint son point de rupture. Sauf que dans The Young Lady, ce point de rupture arrive très tôt et cette héroïne marquante prend rapidement le contrôle, pour ne plus jamais le lâcher.