Critique : Une journée en enfer – Premium Rush

Affiche restaurée d'Une journée en enfer de John McTiernan sur laquelle nous voyons Bruce Willis au premier plan, un immeuble en train d'exploser et l'Empire State Building au second plan.

S’il y a un réalisateur que l’on a envie de revoir sur le devant de la scène en ce moment, c’est John McTiernan. Celui qui a renouvelé le cinéma d’action à la fin des années 80 avec des chefs d’œuvre comme Predator et Piège de cristal est prêt à reprendre du service, à en juger ses dernières interviews données cette année. Si l’on aura vu en 2014 quelques sympathiques surprises qui rendaient hommage aux séries B old school (John Wick, The Equalizer), il y a bien longtemps que le cinéma d’action tourne en rond et se partage entre bourrinades stathamiennes, remakes foireux d’œuvres mythiques et la longue odyssée des super-héros Marvel et DC. La panne d’inspiration se fait donc largement ressentir aux Etats Unis et c’est en revoyant Une journée en enfer que l’on a pris conscience du retard accumulé.

McT a toujours été en avance sur son temps. Il le prouve dès les premières minutes du troisième épisode de Die Hard, qui s’ouvre sur un attentat en plein Manhattan orchestré par Simon, le supposé terroriste qui s’apprête à semer un climat de panique dans New York. 20 ans après, la séquence s’avère toujours aussi moderne et représente la concrétisation de ce que chaque individu redoute. Comme il l’avait brillamment fait avec Piège de cristal, McTiernan nous met face à une peur qui s’est amplifiée au fil du temps et réussit brillamment à perturber le quotidien d’individus normaux se retrouvant dans la merde. En quelques secondes, le réalisateur nous plonge dans l’ambiance et expose une situation froide et radicale sans sacrifier pour autant la notion de divertissement qui caractérisait les deux premiers opus.

Rapidement, le récit est recentré et le jeu commence entre Simon et McClane. Le policier n’est alors qu’un alcoolique suspendu de ses fonctions séparé de sa femme et non le super-héros cynique et passif des deux derniers épisodes. Pour s’en sortir, McClane va devoir utiliser sa matière grise. La dernière fois que l’on a vu un héros faire chauffer son cerveau pour sauver sa peau dans un blockbuster familial, c’était dans Le Hobbit de Peter Jackson. Au 21ème siècle, quelques coups de latte suffisent généralement pour se sortir du pétrin. Liam Neeson pourra le confirmer. De manière intelligente, le cinéaste donne des limites à McClane et introduit le personnage de Zeus, interprété par un Samuel L. Jackson royal, quidam tranquille qui deviendra le temps d’un film l’alter ego du flic imperturbable.

 Photo de Bruce Willis et Samuel L. Jackson dans Une journée en enfer de John McTiernan. Les deux héros s'apprêtent à sauter d'un pont et regardent en bas.

McClane et Zeus ont pour mission d’empêcher l’explosion d’autres bombes installées par Simon dans la Grosse Pomme. Cela permet à McTiernan de filmer le quotidien effréné de New York comme peu de cinéastes et d’utiliser toutes les caractéristiques de la ville pour aider ou au contraire retarder nos héros. On croit percer les motivations de Simon dans le premier tiers mais l’on comprend les véritables intentions du prétendu monstre lors d’un twist qui relance le long métrage et l’emmène dans une autre dimension. A partir de là, le réalisateur permet à McClane, jusqu’ici victime de la machination, de se défouler sans tomber dans la lourdeur et l’exagération omniprésentes dans le quatrième et surtout le cinquième épisode. A l’image de Simon avec les deux partenaires, McTiernan berne son spectateur en lui faisant vivre cette course contre la montre à l’aide d’un montage irréprochable, où la gravité et l’urgence se ressentent à travers l’image et non les interminables discours du flic et ses supérieurs comme c’était le cas dans l’efficace mais prévisible Chute de la Maison Blanche, l’un des rares blockbusters ayant réussi à rendre un hommage acceptable à la saga culte.

Largement supérieur à 58 minutes pour vivre, Une journée en enfer est l’un des films d’action des années 90 les plus créatifs, réussis et jouissifs. Entouré d’un Jeremy Irons glacial et d’un Samuel L. Jackson alors au sommet de sa carrière, Bruce Willis retrouve le rôle qui a fait sa légende dans ce qui restera l’ultime épisode d’une saga emblématique. On espère que McTiernan pourra un jour réveiller l’acteur, qui traîne son regard fatigué dans des productions calamiteuses qu’on n’aurait jamais pu lui prédire à l’époque.

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