Il y a environ dix ans, Tim Burton décevait de nombreux fans avec son remake de La planète des singes. Et il faut avouer que depuis cette adaptation foireuse censée financer Big Fish, le cinéaste s’est quelque peu laissé aller, signant des œuvres plus grand public et à nos yeux moins créatives. Où sont passés le délire loufoque et le kitsch assumé de Beetlejuice ou Mars Attack ? Qu’en est-il de la naïveté débordante d’Edward aux mains d’argent, de l’esprit noir et gothique de Sleepy Hollow ? Evidemment on en retrouvait des traces dans Charlie et la chocolaterie ou Sweeney Todd mais l’impression que l’artiste tombe de plus en plus dans le système cynique hollywoodien se renforce avec les années.
Lorsque Barnabas Collins se réveille après deux siècles de sommeil, il se retrouve dans un monde qu’il ne connaît plus et trouve repère dans le manoir familial, habité par ses descendants. Mais très vite, son passé ressurgit en la personne d’Angelique Bouchard, sorcière qui lui a jeté de nombreux sorts dans son ancienne vie. L’heure de la vengeance a sonné.
Encore une fois, on attendait beaucoup du bonhomme et de Dark Shadows. Avec son vampire qui n’est pas sans nous rappeler Nosferatu et Dracula, sa maison hantée façon Hammer et son casting impressionnant, le quinzième long métrage du cinéaste nous laissait présager une relecture burlesque de nombreux mythes du cinéma fantastique, inspirée par une série américaine du même nom. Burton commence son film avec une introduction assez sombre, voire même tragique. Le réalisateur s’offre des références à ses anciennes oeuvres, notamment avec un arbre qui s’apparente vraiment à celui du très beau Sleepy Hollow, déjà intégré furtivement dans Alice au pays des merveilles. L’ambiance est sympathique même si rien n’est transcendant au niveau de la mise en scène.
Vient ensuite la présentation d’un autre protagoniste, celui de la mystérieuse Victoria, qui débarque dans la demeure des Collins pour répondre à une offre d’institutrice. A ses côtés, nous rencontrons donc toute cette famille loufoque, interprétée en partie par Michelle Pfeiffer (Batman le défi), Chloé Grace Moretz (Hugo Cabret) ou Helena Bonham Carter (Sweeney Todd). Pour le moment, tout se passe bien, les rapports entre tous ces individus déjantés sont assez savoureux et les dialogues nous arrachent même quelques sourires. Mais cela sera de courte durée.
En effet, lorsque Depp sort de sa tombe, c’est le début du cauchemar. Cabotin, l’acteur envoie toutes ses grimaces habituelles et monopolise l’écran. Tous les personnages secondaires sont oubliés, à commencer par la sympathique Victoria, qui tient pourtant une place capitale dans le récit. Le spectateur assiste à un enchaînement de scènes mal montées,que Burton tente de sauver avec une bande originale reprenant tous les tubes des 70’s. Les gags sont réutilisés plusieurs fois et le show de Depp finit bien vite par nous taper sur le système. Pendant près d’une heure, Dark Shadows se révèle plat, sans audace et dénué d’humour. A part un Johnny Depp agaçant, on ne retient que la présence de Moretz, savoureuse en adolescente perdue dans la puberté et Eva Green (Perfect Sense), malheureusement insupportable dans le rôle de la sorcière. Pour contribuer à l’aspect gothique, Alice Cooper est invité pour se donner en spectacle mais sa présence n’est d’aucune utilité.
Mais le pire dans ce bâclage artistique reste la fin. Tim se réveille dans les quinze dernières minutes, nous offre un combat qui tombe dans le mauvais goût, aux effets spéciaux bien indignes de tout ce qu’il a pu faire auparavant. Le sentiment qui se dégage après la projection est que le réalisateur a voulu suivre les tendances actuelles des films de vampire sans y ajouter sa patte, en préférant rester sage pour rassembler un très (très) large public et en se reposant sur un Johnny Depp qui s’est enfermé dans une interprétation loufoque depuis la trilogie Pirates des Caraïbes.
Dark Shadows est donc un gâchis qui enchaîne les incohérences dont la déception dépasse nos espérances. Burton n’assume plus jusqu’au bout son univers pourtant riche et prometteur. On finit par penser que son film aurait pu être réalisé par Catherine Hardwicke (Le chaperon rouge). Notre admiration pour le bonhomme en prend donc un gros coup. Heureusement, son prochain projet Frankenweenie arrive bientôt sur nos écrans et l’on préfère se rabattre sur ce dessin animé, nettement plus alléchant et qui lui tient réellement à cœur.
J’aurais du lire ta critique avant d’aller le voir… ça m’aurait évité de souffrir pendant presque 2h…
Je suis entièrement d’accord avec tout ce que tu as écrit…