Beaucoup d’acteurs qui passent à la réalisation se révèlent meilleurs metteurs en scène que comédiens. C’est le cas de Ben Affleck (The Town, Gone Baby Gone). Ce n’est pas celui de Dany Boon (Rien à déclarer). Et Jalil Lespert ? Est-il préférable qu’il soit devant ou derrière la caméra ?
Jalil Lespert est un bon acteur. Révélé dans Ressources humaines (1999) pour lequel il fut récompensé par le César du meilleur espoir masculin, vous avez pu par la suite le voir notamment dans Virgil (2005), Le petit lieutenant (2005) ou encore Ne le dis à personne (2006). Nous n’avons pas eu l’occasion de voir son premier film en tant que réalisateur, 24 mesures.
Pour Des vents contraires, il retrouve Benoit Magimel qu’il avait déjà dirigé pour 24 mesures. L’acteur interprète ici Paul, un écrivain en manque d’inspiration qui décide de s’installer à Saint Malo avec ses enfants suite à la disparition subite de sa femme (Audrey Tautou). Dans sa nouvelle commune, Paul fera des rencontres qui lui permettront d’évoluer.
Il y avait longtemps que Magimel (Les petits mouchoirs) n’avait pas trouvé un aussi bon rôle. Dernièrement, le comédien s’était légèrement perdu dans les trips pas folichons de Michel Houellebecq (La possibilité d’une île) et les polars peu recommandables (L’avocat, Sans laisser de traces). Ici, il est touchant, naturel, ne sonne jamais faux et l’on ressent la complicité qu’il a avec son metteur en scène. Même si le film est entièrement centré sur lui, Lespert parvient à développer d’autres personnages réellement attachants, même s’ils ne sont là que pour quelques scènes. C’est le cas de Ramzy Bedia (Steak), surprenant dans un registre inhabituel et Bouli Lanners (Louise Michel), valeur sûre venue tout droit de Belgique. Avec leur propre histoire, ils vont influer sur celle de Paul. Ce dernier, ne sachant que choisir entre le deuil et l’espoir, va apprendre à redécouvrir ses enfants et à avancer, avec les bonnes et les mauvaises décisions tout en restant constamment à l’affût d’une nouvelle.
Evidemment, tout cela paraît légèrement neuneu et nous rappelle quelque peu Je vais bien, ne t’en fais pas. C’est normal, le film est l’adaptation d’un roman d’Oliver Adam, également auteur de l’œuvre précitée. Mais Lespert ne traite pas son sujet en forçant les émotions. Il nous livre un cinéma poseur mais pas chiant, même si certains côtés bienpensants sont parfois agaçants.
Sans être bavard, Lespert réussit à provoquer notre affection pour cet individu antipathique au premier abord. On finit par comprendre son raisonnement, ses choix et sa renaissance arrive sans être placardée sur l’écran. Lespert trouve le ton juste et la subtilité nécessaire. Les scènes où l’on voit la relation du père avec ses enfants sont excellentes. Les trois acteurs parviennent à créer un lien sans avoir recours aux mots. On retient notamment une séquence bouleversante du dernier acte où les paroles sont inaudibles et dans laquelle tout se transmet par les regards et les gestes. Tous les autres interprètes sont irréprochables, d’Isabelle Carré (Entre ses mains) à Audrey Tautou (Le fabuleux destin d’Amélie Poulain), toujours agréable. En surjeu constant, Antoine Duléry (Camping) n’est malheureusement pas à la hauteur.
Des vents contraires est un film simple, au propos naïf mais sincère. Comme son personnage, Magimel trouve un nouveau départ. Lespert prouve qu’il est un metteur en scène à suivre et l’on pense même qu’il parviendra à faire encore mieux dans le futur. Le film vient de sortir en DVD et vous pouvez vous le procurer sans appréhensions.