Tout le monde connaît Hannibal Lecter, ce gros taré, toujours droit comme un piquet, tiré à quatre épingles dans sa prison de verre. Considéré comme l’un des plus grands méchants du cinéma, c’est sans doute le seul homme qui n’a pas compris la blague du doigt et du whisky dans La cité de la peur. Vous souvenez-vous de la première fois que vous l’avez vu à l’écran ? Sa première apparition, il la faisait dans Le sixième sens du débutant Michael Mann, sous les traits de Brian Cox (La planète des singes : les origines), dans lequel il ne voyait pas de morts mais les mangeait volontiers. Mais le film qui l’a vraiment popularisé, c’est l’adaptation du deuxième volume de la trilogie de Thomas Harris, Le silence des agneaux.
Dans ce chef d’œuvre de Jonathan Demme (Philadelphia), ce n’est pas lui le personnage principal mais la jeune Jodie Foster (Taxi Driver), qui a déjà une grande carrière derrière elle et un Oscar dans le tiroir reçu deux ans auparavant pour Les accusés. Dans Le silence, Foster interprète Clarice Starling, jeune femme en formation au F.B.I qui va se retrouver avec une lourde enquête sur les bras et devra collaborer avec le psychopathe afin d’obtenir des informations qui l’aideront à avancer.
Leur rencontre arrive dès les premières minutes. Demme filme Foster descendre dans l’hôpital vers le quartier d’isolement de Lecter et des autres siphonnés qui partagent son couloir. On a l’impression que l’actrice s’enfonce très bas sous terre et se dirige vers l’enfer, dans lequel Lecter est le diable. Elle y arrive enfin. Demme alterne entre caméra subjective et plans sur Foster et ce qui l’entoure. On voit que Clarice découvre cet environnement effrayant à la fois de manière sereine et terrifiée. Puis vient le moment durant lequel le garde se doit de refermer les barrières. Malgré toutes les armes à sa disposition et la multitude de caméras de surveillance, nous ne sommes pas rassurés, et Clarice non plus. Evidemment, Hannibal est au fond du couloir car il représente le pire, l’horreur dans toute sa splendeur. Clarice s’approche lentement, et découvre derrière ce mur de cristal un individu bien portant au visage angélique. Pourtant, c’est bien de Lucifer qu’il s’agit ici. S’ensuivra une confrontation en champ-contrechamp serrée et oppressante devenue légendaire.
Il est évident qu’Hopkins trouve le rôle de sa vie avec ce film. Il ne mange pas que les humains, il dévore également l’écran et nous laisse de marbre, tout comme le reste du casting constitué des excellents Scott Glenn (Silverado) et Ted Levine (Heat). Demme signe ici l’une des meilleures œuvres des années 90, redonnant un coup de jeune au thriller psychologique. Hannibal, personnage complexe que même Freud aurait eu beaucoup de mal à déchiffrer, parvient à provoquer un rejet mais également une fascination. En ce sens, nous spectateurs, devenons comme Clarice, et le psychiatre cannibale arrive presque à rentrer dans nos têtes. Je préfère ne pas trop le laisser s’approcher, j’ai peur que mon petit cerveau finisse dans une poêle.
Le silence des agneaux est la meilleure adaptation des romans de Thomas Harris. A travers cette chasse entre trois personnages dont un que nous avons préféré ne pas aborder pour laisser la surprise à ceux qui ne l’ont jamais vu, le spectateur est pris dans un suspense parfois insoutenable et dont chaque scène restera gravée. Demme trouve une forme qu’il ne retrouvera pratiquement pas par la suite. Tout en détails, sans longueurs et scènes inutiles, Le silence des agneaux est une plongée dans l’univers des serial-killers à la fois réaliste, impressionnante et d’une certaine façon, belle.
Autre anecdote que tu dois sûrement savoir sur ce film : Hopkins ne cligne jamais des yeux. Trop fort.
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