Steven Spielberg tourne à toute allure, mais il le fait bien. Avec son rythme on pourrait s’attendre à des films bâclés, incomplets et sous-développés. Et pourtant. En février sortait chez nous son joli Cheval de guerre, œuvre naïve totalement maîtrisée dans sa mise en scène et dans la gestion des différents axes dramatiques tournant autour du destrier perdu dans le Première Guerre mondiale. Ce mois-ci, ce sont Les aventures de Tintin et le secret de la Licorne qui viennent d’arriver dans nos bacs sous plusieurs éditions toutes plus alléchantes les unes que les autres.
Attardons nous sur une seule séquence, ou plutôt deux, qui résument très bien l’esprit du film. Il s’agit des dix premières minutes du long métrage. Pour son sublime générique, Spielberg a opté pour un hommage aux dessins d’Hergé dans lequel on découvre l’ombre de notre reporter préféré dans ses différentes enquêtes, à la poursuite d’un ennemi ou chassé par d’étranges individus au dessus d’un train. On plonge ainsi directement dans l’univers du dessinateur belge et l’on voit tout de suite que Spielberg n’a pas l’intention de se moquer de nous et qu’il connaît sur le bout des doigts son modèle même s’il commettra plusieurs infidélités durant tout le reste de l’œuvre. En plus de cela, il réussit un travail digne de Saul Bass, le célèbre designer reconnu pour son travail avec des génies de l’ordre de Martin Scorsese (Casino) et surtout Alfred Hitchcock (Psychose). Il fait appel à son compositeur fétiche, John Williams (Star Wars), pour un joli thème plein de fougue et d’entrain, supérieur à tout le reste de la bande originale malheureusement décevante à l’inverse de celle de Cheval de guerre.
Puis arrive la motion capture. On est frappé par cette précision, par tous ces détails qui donnent à nos rétines un plaisir immense. Rien que pour ce film, acheter une télévision HD-Ready et un lecteur Blu Ray représente un bel investissement. Spielberg et son compère Peter Jackson ont assuré, on le découvre dès l’entrée. Les mouvements de caméra sont majestueux, les défauts de gesticulation des personnages présents par exemple dans les films Robert Zemeckis (Le drôle de Noël de Scrooge) ont disparu. Nous venons de passer un cap. La perfection est devant nos yeux.
Tous les éléments qui caractérisent Les aventures de Tintin sont là. En voyant le petit à la houppette se faire dessiner le portrait par un belge au visage familier, on retrouve l’humour cher à ces anglais de la bande d’Edgar Wright (Shaun Of The Dead, Hot Fuzz), qui assurent le scénario et dont les deux interprètes fétiches Nick Frost et Simon Pegg donnent leur voix et leur gestuelle à ces deux canailles de Dupont et Dupond qui sont à la poursuite dès les premières minutes d’un pickpocket de compétition. Spielberg joue avec les reflets pour nous montrer la malice de Tintin, son trait de caractère le plus prononcé, qui tombe sous le charme d’une très belle maquette de bateau nommée la Licorne et dont il fait l’acquisition pour trois fois rien. Mais il est bousculé par un mystérieux individu, qui souhaite absolument le lui racheter, à n’importe quel prix. Les doutes s’installent, la curiosité de Tintin arrive. L’enquête peut commencer.
Loin d’être parfait dans son scénario qui comporte quelques longueurs et délaisse certaines intrigues secondaires, Les aventures de Tintin et le secret de la Licorne n’en reste pas moins un film de divertissement jouissif et un aboutissement technique qui ne laissera personne de marbre.