Seven fait partie de ces films que l’on adore, que l’on expose fièrement dans notre collection mais desquels on ne se souvient plus. Evidemment, la fin nous a marqués et l’on se rappelle de quelques séquences inoubliables, comme la vision de cet énorme bonhomme gavé aux spaghettis bolognaises qui nous hante depuis notre tendre enfance. C’est pour cela que lorsqu’on a vu qu’une projection du long métrage de Fincher était organisée dans un cinéma que nous apprécions beaucoup, nous nous sommes rués sur l’occasion pour redécouvrir ce polar phare des 90’s.
Seven est un buddy movie sombre, glauque et perturbant. Ici, Morgan Freeman a seulement son cran d’arrêt, sa solitude et sa culture pour avancer dans l’enquête. Brad Pitt n’a pas la classe d’un Paul Newman ou Robert Redford. Il est angoissé et impulsif mais ne joue pas les super héros à la manière de Mel Gibson.
Fincher, l’un des meilleurs magiciens de l’image de sa génération, distille une ambiance poisseuse qui place le spectateur dans un état de malaise dès les premières minutes du film. Les couleurs sont sombres, la pluie envahit la ville plongée dans le chaos, les personnages sont complexes et torturés, les meurtres atroces. A côté, Sin City est un lieu de relaxation. Nous suivons ces deux policiers qui essayent d’améliorer ce monde crasseux malgré leurs désillusions et comme souvent dans ce genre de longs métrages, ce sont leurs différences qui vont enrichir leur relation. Attachants, les inspecteurs suscitent l’empathie du public qui a envie de les voir démêler cette intrigue malsaine.
Comme Usual Suspects, Seven a pris un petit coup de vieux et même si le scénario est très bien ficelé et se termine sur un coup de maître, il est difficile aujourd’hui d’être complètement surpris par les rebondissements. Normal, étant donné que beaucoup de polars de la fin des années 90 et du début du XXIème siècle ont réutilisé la recette concoctée par Fincher, avec cependant beaucoup moins de réussite. On aura donc eu droit à un grand nombre de longs métrages tièdes, à l’image de Bone Collector, Le collectionneur, Le masque de l’araignée, Intraçable ou Tatie Danielle. Mais malgré tout, le concept d’utiliser les sept péchés capitaux comme motifs de meurtres reste une idée brillante et donne lieu à des situations extrêmes et totalement inattendues.
Le tueur John Doe fait des références à des auteurs passionnants, à commencer par Hemingway. Le film se termine d’ailleurs sur une phrase emblématique de l’écrivain qui ponctue parfaitement cette descente en enfer. Cela confère au long métrage une certaine poésie et une beauté qui nous laissent de marbre. Dans toute cette horreur, Fincher fait émerger des choses sublimes et si son oeuvre est éprouvante et fataliste, son message l’empêche de plomber le moral du spectateur et l’on ressort de la salle secoué mais pas écœuré.
Seven est une œuvre culte qui aura marqué son époque pour de bonnes raisons. Porté par un duo d’acteurs au sommet, ce thriller fait encore aujourd’hui son petit effet. Les différences de mise en scène entre ce film et Millénium, le dernier Fincher, prouvent que le réalisateur ne cesse d’innover et d’expérimenter. Moins posé et peut être moins mature, Seven n’en reste pas moins un petit bijou immanquable. Les amateurs pourront le (re)découvrir dans une copie Blu-Ray impeccable sortie il y a maintenant deux ans.
Le genre de films qui vous prend aux tripes (sans mauvais jeux de mots). La « ville » prend une dimension inquiétante au point de rester cloitré dans son T2 quelques semaines après le visionnage. Sinon j’aime beaucoup la référence à Tatie Danielle.