On se demande comment cette comédie romantique n’a pas pu sortir en salles. Le genre fonctionne pourtant assez bien dans l’Hexagone et l’on retrouve même à l’affiche de nombreux films qui s’inspirent ouvertement des classiques hollywoodiens (20 ans d’écart, Un prince presque charmant) même si le niveau n’est jamais le même. Les deux acteurs principaux sont des comédiens reconnus et appréciés (Michelle Williams et Seth Rogen) mais malgré cela, les distributeurs n’en ont pas voulu. On s’est donc rabattu sur le DVD qui vient tout juste de sortir et on vous conseille de passer directement à la FNAC après votre journée de travail car Take this waltz est la meilleure œuvre romantique vue depuis un moment.
S’il n’est en aucun cas un chef d’œuvre, le premier long métrage de Sarah Polley n’en reste pas moins une excellente expérience qui secoue et met une petite claque. Son scénario est d’une simplicité effarante, tout comme sa mise en scène et c’est ce qui a provoqué en nous un malaise et une sensation étrange. En suivant l’histoire de Margot, jeune femme mariée à l’attentionné Lou qui tombe amoureuse de Daniel, l’homme de sa vie, il est impossible de ne pas se raccrocher à ses questionnements et ses hésitations.
Ici, on oublie toutes les fioritures hollywoodiennes, les embrassades sous la pluie, les chargés de marketing qui vivent dans des duplex de 400 m2 dans les plus belles métropoles du monde et qui n’ingurgitent que de la salade pour garder la forme. Sarah Polley filme la vie quotidienne dans tout ce qu’elle a de plus monotone. Les remises en question qui tourmentent Margot, n’importe quel individu peut y être ou y a déjà été confronté et c’est pour cette raison que l’on éprouve un attachement profond pour ce trio qui, à défaut de prendre les bonnes décisions, est toujours doté de bonnes intentions.
L’aspect réaliste volontairement mis en avant fait toute la beauté du film et rarement ces dernières années on aura vu une oeuvre du genre qui se détachait aussi facilement des conventions et des passages obligatoires. Si cette approche rend le film magnifique, elle provoque également un malaise car Take this waltz n’est pas le feel good movie que l’on s’attendait à voir. Le long métrage prend aux tripes et met face à certaines de nos angoisses les plus profondes. Si la vie de couple de Margot et Lou semble parfaite, la distance qui s’installe à cause de la routine nous heurte. Lorsque Margot passe du temps avec Daniel, son sentiment de culpabilité nous gagne malgré notre envie de voir la jeune femme s’épanouir. Sarah Polley fait preuve d’une sensibilité et d’une subtilité rares et Take this waltz est une expérience cinématographique qui remue des sensations et émotions que l’on préfère généralement mettre de côté lorsque l’on se rend au cinéma pour voir une comédie romantique.
Take this waltz doit en grande partie sa réussite à sa comédienne principale. Une nouvelle fois après Blue Valentine et Shutter Island, Michelle Williams se glisse dans la peau d’une femme tourmentée. Cependant, elle ne perd jamais sa naïveté, son innocence et son optimisme. Le sourire enfantin qu’elle arbore durant tout le long métrage la rend sublime. On retiendra également une séquence magique qui délaisse tout le côté réaliste au profit de de la fantaisie durant laquelle Polley filme l’acte sexuel sans enjolivement mais sans pour autant le rendre froid et chirurgical.
Vous vous reconnaîtrez probablement dans Take This Waltz, dans un personnage ou peut être seulement une situation, un dialogue ou une pensée. Le long métrage est la meilleure proposition sur l’amour vue en 2013 avec A la merveille, le poème majestueux de Terrence Malick.