En 1997, soit deux ans avant Fight Club et deux après Seven, David Fincher réalisait The Game, autre thriller paranoïaque moins mis en avant que les deux longs métrages avec Brad Pitt mais pourtant très intéressant, efficace et mis en scène avec brio. Avec ces trois films, il s’imposa comme l’un des réalisateurs incontournables de la génération 90’s et le bougre continue de nous épater avec des œuvres plus classiques comme l’excellent Benjamin Button, des fresques qu’il est le seul à pouvoir rendre intéressant comme The Social Network ou des retours au genre avec lequel il a bâti sa réputation comme Millénium.
Nicholas Van Orton est un homme d’affaires antipathique qui déteste les surprises, vit dans un quotidien où tout est chronométré, droit et sans fioritures. Antipathique et aigri, il habite seul dans l’immense demeure familiale qu’il a héritée de son père après le suicide de ce dernier. Le jour de son anniversaire, son frère Conrad lui offre une invitation pour participer à un jeu organisé par la société CRS, qui offre à ses clients des services uniques et très divertissants. Très vite, la vie de Nicholas va devenir un véritable enfer à cause de ce jeu mystérieux aux règles quasiment inexistantes. Que lui veut cette mystérieuse entreprise ? Pourquoi tout le monde semble faire partie de ce plan machiavélique ? Sombrant peu à peu dans la paranoïa, Nicholas cherche désespérément des réponses, même si le jeu risque de lui coûter la vie.
The Game fait partie de ces films qui vous perdent lors du premier visionnage. Comme le personnage principal interprété par Michael Douglas (Basic Instinct), nous nous méfions de tout le monde, tentons de dénoter les détails qui pourraient nous faire avancer dans l’intrigue mais Fincher réussit tout de même à nous surprendre et à nous envoyer des twists assez originaux dans les vingt dernières minutes. Le cinéaste sait créer des ambiances oppressantes et jouer avec nos nerfs. Entre Alien 3 et Panic Room, il a prouvé qu’il savait parfaitement gérer son cadre pour mieux immerger son spectateur et créer un univers. Ici, nous ne sommes pas dans une maison miteuse, un parking, une prison interstellaire ou une chambre forte. Fincher nous emmène dans les rues symétriques de San Francisco, dans des buildings et un manoir vides à l’image de la vie du héros.
Van Orton est une sombre ordure, un misanthrope satisfait et l’on ne peut s’empêcher de se dire que tout ce qui lui arrive est mérité. On se prend au jeu et l’on adore le voir dans des situations qui dégénèrent au fur et à mesure. Fincher instaure une relation perverse entre Van Orton et le public qui prend un plaisir monstre à le voir souffrir. Michael Douglas trouve ici un rôle qui lui convient parfaitement et l’acteur nous rappelle qu’il est très doué pour jouer les salopards sans scrupules (Wall Street) et les types borderline, au bord de la rupture (Chute Libre). Sean Penn n’est présent que pour quelques scènes mais sa présence est mémorable. Nous ne savons jamais s’il est sincère ou dans le « jeu », et son personnage a quelques points communs avec l’avocat véreux de L’impasse.
The Game est une œuvre qui ne vous lâche pas, dans laquelle tout est calculé. Le scénario ouvre des pistes peu communes et se termine sur une fin loin d’être décevante. Fincher dynamise son film avec un montage ultra-rythmé, dans lequel ses origines clipesques refont surface. On pardonnera les quelques incohérences et le bâclage de certaines explications. Ou peut-être avons-nous mal regardé… Peut-être que la partie s’est aussi jouée de nous.