Joseph est le genre de mec qui pète les plombs. Il a tout perdu, sa femme, son chien et n’a pas de job. Il n’a plus rien à faire alors il siffle des Buds. Après avoir agressé trois jeunes dans un pub, il se réfugie un jour dans le magasin d’Hannah et s’effondre en larmes. Entre attraction et rejet, il va nouer avec elle une relation tumultueuse qui ne les laissera pas indemnes.
Tyrannosaur est le premier film de Paddy Considine, acteur que l’on a notamment pu voir dans In America (2002) ou La Vengeance dans la peau (2007). Globalement, il est difficile de reprocher des choses au jeune réalisateur. Mise en scène soignée, acteurs en très grande forme, Considine a su évoquer plusieurs thèmes difficiles comme la violence conjugale, la rage d’un individu tourmenté, le pardon et la seconde chance sans tomber dans le misérabilisme comme Lee Daniels avait pu le faire dans Precious (2009).
En effet, les deux protagonistes principaux ont vraiment, pardonnez-nous pour l’expression, des vies de merde mais en aucun cas ils ne sont abordés en tant que victimes, du moins pas totalement et l’on découvrira aussi leur mauvais côté respectif. Hannah est en retenue constante, subit sa vie mais ne s’en plaint pas, prône le pardon comme valeur ultime. A l’inverse, Joseph déploie sa rage sur n’importe qui, n’importe quand et pour n’importe quoi. En apprenant à se connaître, ils s’influenceront mutuellement. Joseph apprendra à se maîtriser tandis qu’Hannah laissera ressortir la haine qu’elle éprouve pour son mari à travers une scène mémorable.
A la fois film d’amour véritable et parcours salutaire d’un homme en perdition, Tyrannosaur est épatant. Malheureusement, la froideur volontaire de l’ensemble, la grisaille de ce Glasgow populaire et la lenteur de certaines scènes alternée avec la brutalité du personnage le rendent profondément triste et déprimant. Evidemment, tout cela est voulu, nécessaire et traité sous un bon angle. Considine appuie également trop sur l’aspect religieux. On respecte son choix mais l’on aurait aimé un message plus subtil, à l’image du symbolisme de l’œuvre, qui le suit jusque dans son titre.
Le Tyrannosaur, le monstre, c’est Peter Mullan, à l’inverse de ce qu’il aurait voulu nous faire croire dans une scène clé. On le redoute mais il nous fascine, et chacun de ses pas et mouvements respirent la souffrance. L’acteur (War Horse, Boy A) trouve sans aucun doute l’un des rôles de sa vie et livre l’une des performances les plus éblouissantes de l’année.
Pour son premier film en tant que réalisateur, Paddy Considine livre une œuvre sociale intéressante comme savent si bien le faire Ken Loach (Le vent se lève) ou le Jim Sheridan de la grande époque (The Field, Au nom du père). Hélas, on en sort à moitié convaincu à cause de la dimension religieuse trop présente et d’une certaine sensation de déjà-vu qui nous ferait presque croire que l’on s’est ennuyé.