Weiss est commandant à la brigade mondaine. Tous les soirs, il défile dans les différents clubs de la capitale pour s’assurer que tout tourne bien. Mais cette nuit, il apprend que quelqu’un a voulu le doubler. C’est ainsi que débute une longue traversée dans les rues obscures de Paris.
Avec son unité de temps réduite, Une nuit ne peut qu’attirer la curiosité et l’on espère assister à un Training day ou un Collatéral dans les rues de Paris. Au lieu d’essayer de dynamiter le genre comme Fred Cavayé ou Frédéric Jardin avaient tenté de le faire avec A bout portant et Nuit Blanche, Philippe Lefebvre préfère emmener son spectateur dans les ruelles sombres et les boites glauques en prenant son temps.
En effet, le réalisateur du Juge opte pour une exposition qui s’avère un peu longue. Lancé dans cet environnement peu recommandable, le public suit le héros Roschdy Zem (36 quai des orfèvres), souvent filmé de dos, parcourir les établissements en quête d’une information qui le conduira jusqu’à sa balance. Les épaules voûtées, le regard fatigué, l’acteur est magistral. Il nous fait oublier les appréhensions que l’on avait au début du long métrage. On avait peur d’assister à une exploitation racoleuse du genre montrant les allées crades de la capitale et nous rappelant les pires reportages produits par Charles Villeneuve. Finalement, le monde de la nuit est utilisé habilement pour mieux développer un personnage pas totalement propre, pas vraiment pourri non plus, comme c’est souvent le cas dans ce genre de fictions (Braquo, Le prix de la loyauté…). Dans le rôle de sa chauffeuse, qui l’emmène dans les quatre coins de la ville, Sara Forestier (Le nom des gens) est amenée à défiler avec lui et le voir utiliser des méthodes limites mais ne peut qu’éprouver un sentiment d’empathie. Silencieuse et discrète, on la voit traverser le film l’air de rien mais son rôle est d’une importance capitale car elle découvre comme le spectateur ce monde perverti.
Au niveau de l’intrigue, le scénario est classique mais fonctionne. Au lieu de s’attarder sur des clubs malsains, Lefebvre préfère y passer peu de temps pour faire avancer son histoire. Pas de provocation, de violence gratuite mais une volonté de suivre un homme épuisé dans un monde qu’il connaît trop bien et lui colle à la peau. Ce qui devait arriver arrive, et même si Une nuit ne révolutionne en rien le genre, il se laisse apprécier pour son interprète principal et les grandes gueules qui gravitent autour, à l’image de Jean Pierre Martins (La môme) ou Richard Bohringer (C’est beau une ville la nuit). Le seul qui n’est malheureusement pas convaincant, c’est Samuel Le Bihan, qui nous sort le même registre que dans L’ennemi public numéro 1 ou Braquo. Dans le rôle de l’homme d’affaires et du meilleur ami loyal, il en fait des tonnes et enlève toute crédibilité à certaines scènes pourtant fortes sur le papier.
Une nuit est l’inverse des thrillers français qui utilisent un rythme effréné pour lessiver leurs spectateurs. Avec sa lenteur affirmée, la démarche lourde mais toujours forte de son interprète principal, le film de Lefebvre parvient à nous faire le même effet en utilisant une mise en scène beaucoup plus classique mais néanmoins efficace. Une œuvre réaliste que l’on ne recommande pas uniquement aux amateurs du genre et qui vient tout juste de sortir en DVD.