Critique : You don’t know Jack – La mort lui va si bien

Affiche du téléfilm You don't know Jack sur laquelle nous voyons Al Pacino de face, souriant à moitié.

Les séries HBO sont souvent de très bonne qualité. Avec Les Soprano, The Wire, Six Feet Under, Rome, Boardwalk Empire ou encore Game of Thrones, on peut dire que la chaine de télévision américaine a marqué le paysage du petit écran avec des œuvres cultes qui resteront dans les mémoires. Sa filiale HBO Films, qui s’occupe des mini-séries et des téléfilms, nous a fourni des productions plus courtes, mais tout aussi appréciables. Rappelez vous, Band of brothers et The pacific, c’était eux. Angels in America, avec Meryl Streep et Al Pacino, c’était encore eux. D’ailleurs, ce dernier fut récompensé en 2010 par le Golden Globe du meilleur acteur dans une production télévisuelle, orchestrée une nouvelle fois par HBO, pour son rôle du docteur Jack Kevorkian, figure emblématique aux Etats Unis et partisan d’une pratique qui a tendance à créer le débat et diviser, l’euthanasie.

Réalisé par Berry Levinson, cinéaste qui nous a offert de sympathiques longs métrages tels que Rain Man ou Good Morning Vietnam mais qui s’était ramolli ces dernières années, notamment avec Panique à Hollywood, You don’t know Jack dresse le portrait d’un homme déterminé et prêt à tout pour convaincre la population et les autorités de l’importance du suicide assisté médicalement.

Le spectateur est embarqué au début des années 90 dans un univers assez terne qui correspond parfaitement au personnage représenté. En effet, individu complexe et parfois perturbant, Kevorkian est un être paradoxal en apparence dénué de sentiments mais qui mène un véritable combat pour les autres pour une cause qui elle fait appel à nos émotions les plus profondes.

Affiche du téléfilm You don't know Jack qui est un portrait du personnage interprété par Brenda Vaccaro. Le slogan de l'affiche est le suivant : "This woman wants to help you die. With Respect."

Ne cherchant pas à faire un film qui relancerait la propagande ou nous forcerait à adhérer à la cause, Levinson préfère développer son sujet lentement, exposer toutes les facettes de Kevorkian et tout son parcours depuis son engagement à la fois médical et politique. En cela, le format télévisuel lui convient beaucoup mieux car les artifices de mise en scène ne sont en rien spectaculaires et paraissent parfois assez plats, même s’il jongle plutôt bien entre fausses images d’archive et description rapide des cadavres en noir et blanc. Ce qui heurte le plus le spectateur, ce n’est pas tant de voir les individus souffrants, même si les séquences en question sont touchantes, mais l’acharnement du médecin qui finit par se retrouver seul et qui continue sa lutte coûte que coûte. « Est ce que cet homme a l’air d’un tueur ? » nous demande l’affiche. Avec son comportement froid et son inexpressivité, on a parfois envie de répondre oui.

Al Pacino, vieilli pour l’occasion, est remarquable. Impossible à cerner, le regard dur et fatigué, il livre une prestation impressionnante qui rattrape aisément toutes les purges qu’il a tournées ces dernières années (88 minutes, La loi et l’ordre). Comme son confrère Robert De Niro le faisait dans le classique Everybody’s fine, il prouve qu’il en a encore sous le capot et continue de nous bluffer. Il est entouré de seconds rôles magistraux tels que John Goodman (The Big Lebowski) qui tourne de plus en plus pour la télévision ou Susan Sarandon (Thelma & Louise). Le seul reproche que l’on peut faire à un comédien, c’est le choix de la moumoute de Danny Huston qui vaut bien celle qu’il arbore dans La colère des titans. L’intelligente écriture du scénario et le jeu des acteurs permettent au téléfilm d’éviter de tomber dans le manichéisme, même si le puritanisme de certains protagonistes est évidemment critiqué. Chacun a ses idées et dispose du droit de les exposer et de les défendre. Du moins c’est ce que l’on croit. La dernière partie du film, cynique dans le bon sens du terme, dénonce les injustices du système américain sans pour autant lui cracher dessus et Levinson ponctue son œuvre au bon moment pour mieux nous marquer.

You don’t know Jack est une très bonne surprise calibrée pour le petit écran qui brille par la simplicité de la réalisation qui sert parfaitement son propos et par des interprétations d’acteurs qui trouvent une meilleure place à la télévision que dans des productions stupides destinées aux salles obscures. Décidément, HBO n’en finit pas de nous épater.

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2 réponses à Critique : You don’t know Jack – La mort lui va si bien

  1. Interessant comme sujet. Je vais peut être y jeter un oeil tout comme Angels in America dont je n’avais jamais entendu parlé. Je suis pourtant un inconditionnel de Meryl Streep, comment ai je pu passer à côté!!! Merci en tous cas

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